« En épousant un algérien, vous nous tirez vers le bas » : voila ce qu’une citoyenne française s’est entendu dire par un employé de l’administration auquel elle avait affaire pour le dossier de régularisation de son mariage. Le documentaire de Nicolas Ferran donne la parole à des couples dits mixtes qui tous, peu ou prou, se heurtent ou se sont heurtés aux mêmes difficultés : présomption de mariage blanc ou de tromperie, viol de l’intimité, interpellations plus ou moins brutales… Chaque entretien révèle un drame personnel, un état fluctuant entre résignation et révolte, un temps infini consacré à l’obtention d’un visa, quitte parfois à risquer sa vie pour l’avoir demandé ou l’obtenir.
L’incrédulité ressort également du parti tiré par l’administration ou la police de l’observation de règles prescrites par le mariage : vivre ensemble, normalement, simplement, sans avoir à justifier le moindre geste, le moindre comportement. Avoir à montrer qu’il y a bien deux brosse à dents dans la salle de bains évoque plus Kafka, Orwell ou le Terry Gilliam de « Brazil », que l’exercice normal de la vie de citoyen, de couple d’être humain.
L’une des personnes interrogées dit : « j’aimerai me fondre dans la masse, m’épanouir, travailler, payer des impôts« . Quoi de plus normal et, en même temps, quoi de plus difficile ? Car comment y parvenir quand il faut accomplir des démarches incessantes, se justifier, faire le dos rond devant les fonctionnaires parfois agressifs, cela durant plusieurs années ? Quand le mari français d’un couple dit : « la République ne reconnaît pas ses enfants« , il souligne le fossé qui existe entre l’image d’un pays qui se dit accueillant – et qui le fut – et son comportement actuel vis-à-vis des étrangers. D’une certaine manière, c’est un sentiment de honte qu’il exprime.
Ce film entre en résonance avec le texte écrits pour le théâtre par Massamba Diadhiou, « L’amour au ban » (Acoria Editions) qui a concouru pour le prix Seligmann 2012 contre le racisme. Les situation représentées sont identiques à celles, vécues, du film. Le même sentiment d’absurde, d’acharnement et d’atteinte à la dignité en découle.
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