Moi c’est Zahia,
Lui, c’est B.
Tout commence comme une belle histoire d’amour mais je ne vais pas vous raconter notre rencontre, je garde ça pour moi, cela nous appartient.
Le récit que je voudrais vous faire, c’est celui de l’attente qui n’en finit plus, de l’incompréhension, du mépris auquel nous faisons face tout simplement parce que nous n’avons pas la même nationalité.
Je suis française, il est algérien. Et alors ? Qu’est-ce que ça change ?
Je vais vous le dire : mon mari doit remplir tout un tas de conditions pour avoir le droit de vivre à mes côtés ici en France, pour avoir le droit d’y travailler aussi, bref pour avoir des papiers quoi.
D’accord. Très bien.
Tout commence quand nous nous sommes présentés au guichet de la préfecture. Nous ne voulions qu’une chose B. et moi, comprendre quelle était la démarche à suivre et comment nous y prendre pour qu’il obtienne un titre de séjour.
Tout s’est passé très vite, il y avait beaucoup de monde, la personne de l’autre côté de la vitre n’avait pas le temps je crois.
On nous a dit que B. ne remplissait pas les conditions pour demander un titre de séjour, même si nous étions mariés. On nous a dit qu’il devait repartir en Algérie, aller au Consulat de France à Oran, demander un visa long séjour et qu’il pourrait ensuite revenir en France sans difficulté.
Faire un aller-retour en Algérie, ce n’était pas vraiment prévu. Devoir vivre séparés par des milliers de kilomètres sans savoir combien de temps ça allait durer, ce n’était pas ce que nous avions imaginé.
B. ne voulait pas prendre de risques, il a obéi : il est parti. Et il a fait sa demande de visa.
C’était il y a deux ans.
Demandes de justificatifs, attente, refus, nouveau dossier, demande de justificatifs, attente, refus, recours, audience, jugement, attente, attente, attente…
Notre histoire a été décortiquée par le consulat, par le ministère, par la juge. Et je ne comprends toujours pas ce système : c’est quoi le critère qui leur manque pour que B. ait enfin son visa et que nous puissions nous retrouver ?
Ils ne sont pas à notre place : je suis épuisée de toutes ces démarches, B. n’en peut plus d’être dans l’attente là-bas en Algérie. Nous nous soutenons comme nous pouvons, une fois c’est lui qui me remonte le moral, une fois c’est moi qui lui dit que ça va aller. Notre entourage ne comprend pas forcément ce qui se passe, nous devons nous appuyer sur des avocats, sur des associations pour comprendre nos droits et les faire valoir.
Mais depuis deux ans que nous attendons les retrouvailles, je me dis qu’ils vont toujours trouver un nouveau prétexte, qu’il faudra encore recommencer notre dossier à zéro et que le moment va venir ou ni lui ni moi ne tiendrons plus le coup.
A force de devoir nous battre sans cesse, l’espoir s’effrite et la santé en prend un coup. Je suis dans l’impossibilité de voyager pour lui rendre visite, il n’obtiendra jamais de visa touristique pour me rendre visite en attendant d’avoir le droit de rester. Pour moi, pour nous, c’est de la maltraitance morale.
Si ça continue comme ça je vais finir par faire une grève de la faim, mais est-ce que ça servira à quelque chose ? Est-ce que le consulat et le ministère vont finir par délivrer ce bout de papier de quelques centimètres qui représente tant pour nous aujourd’hui ?
Le pire, c’est que nous avons une décision du Tribunal Administratif de Nantes en notre faveur, mais personne ne semble en tenir compte, et il ne se passe rien. Pour eux c’est peut-être deux semaines de plus dans la procédure, mais nous, nous comptons les heures.
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