Mon compagnon et moi vivons ensemble depuis cinq ans. Depuis le début, il est question de poursuivre le chemin de notre existence éclairé par un amour partagé et total, symbolisé par un Pacs que nous avons signé dès le premier mois. Non seulement mon compagnon a repris des études de français pendant un an (il est Japonais), mais il s’est intéressé à l’histoire et à la culture de la France, où il a antérieurement acquis plusieurs diplômes. Mon conjoint a été très bien reçu par ma famille, qui le considère comme l’un des siens. De mon côté, ma profession me permet d’assumer notre ménage. Si dans un premier temps, mon compagnon a sollicité une carte de séjour étudiant parce qu’il ne pouvait pas faire autrement la première année, il a demandé ensuite un titre de séjour « Vie privée et familiale », qui est reconduit depuis.
Quels n’ont pas été notre étonnement et notre consternation au cours de notre dernier rendez-vous à la Préfecture de Police. Les liens familiaux, le Pacs, la perspective du mariage, la prise en charge financière, la vie commune depuis presque cinq ans, la réunion de tous les documents officiellement demandés, toutes les conditions nous paraissaient réunies pour solliciter une carte de résident. L’agent à qui nous avons eu affaire ne s’est pas borné à donner des explications. Il a parlé en insinuant que jamais mon compagnon ne pourrait obtenir de carte de résident, faute de ressources – alors que notre imposition comporte deux parts. Même après le mariage, selon lui, il faudrait attendre encore trois ans, qui ne suffiraient probablement pas à l’obtention de cette carte. Si cet agent avait cherché à nous décourager, il ne s’y serait pas pris autrement. Ne pas solliciter de carte de résident, demander à vie la carte de séjour annuelle « Vie privée et familiale », telle est pour lui la solution, à moins de nous séparer. Ce monsieur, censé représenter la Préfecture de Police de Paris, a affirmé en outre que « le mariage, de toute façon ça ne vaut pas la peine ». Nous avons été victimes d’une forme d’intimidation. S’agit-il d’un comportement personnel de l’agent, ou bien la Préfecture encourage-t-elle une telle attitude, et dans quel but ?
En outre, deux distorsions apparaissent à l’intérieur d’une loi qui laisse intentionnellement une part de flou et d’arbitraire. Ayant pris en charge mon compagnon depuis cinq ans, je ne vois pas au nom de quoi l’institution serait en droit d’exiger de lui des ressources. Ne représente-t-il pas l’une des deux parts de l’imposition ?
Nous constatons ensuite un problème dans la loi. Nous sommes pacsés et allons nous marier. Un hétérosexuel étranger pacsé doit attendre cinq ans pour demander une carte de résident, ou bien trois ans s’il s’est marié. On peut comprendre cela parce que les hétéros ont depuis longtemps le choix entre le mariage et le Pacs. Il n’en va pas de même pour les homosexuels : le mariage est nouveau, et constitue le prolongement du Pacs. Le Pacs que nous avons signé devrait être pris en compte et avoir un effet rétroactif par rapport à la prise en compte de la durée de vie commune, et même par rapport à la nature du lien.
Nous avons été profondément blessés par le discours qui nous a été tenu. Sans doute la carte « Vie privée et familiale » est-elle délivrée ; mais c’est comme si l’Etat ne reconnaissait pas notre volonté de demeurer éternellement unis sur le sol français, et qu’il nous mettait au défi. Intimider des personnes de bonne foi, qui ne demandent qu’à vivre ensemble et à s’aimer, voilà l’attitude déplorable que nous avons rencontrée, génératrice d’angoisse pour l’avenir.
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