Deux responsables de l’enseigne hard-discount Lidl viennent d’être condamné à six et quatre mois de prison avec sursis pour discrimination à l’embauche en raison de l’origine à la suite d’une plainte qui avait été déposée par une ressortissante ivoirienne mariée à un Français. Il était reproché aux intéressés d’avoir donné pour instruction aux recruteurs de Lidl de ne pas embaucher de personnes étrangères titulaires d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ».
Il est rare que de telles plaintes débouchent sur un procès, et plus encore sur une condamnation. Comme l’avait précisé à la presse Faty Diop, substitut du Procureur, « la difficulté est de rapporter la preuve. Les justiciables se découragent. C’est la première procédure qui aboutit ». On ne peut donc que se féliciter de cette décision de justice.
Tous les coupables n’ont cependant pas été jugés. Sur le ban des accusés aurait du se trouver la politique d’immigration qui depuis plusieurs années s’attache à restreindre l’accès à un statut administratif stable pour cantonner durablement de plus en plus de ressortissants étrangers dans le sas des titres de séjour temporaires.
Louer un appartement, trouver un emploi stable, obtenir un prêt bancaire pour acquérir un logement ou financer un projet professionnel sont autant de démarches qui sont difficiles, voire impossibles, lorsqu’on ne présente qu’un titre de séjour précaire, dont le renouvellement n’est jamais définitivement garanti. En outre, la procédure de renouvellement des cartes de séjour temporaire est longue de sorte que leurs titulaires sont obligés de vivre tous les ans, pendant plusieurs mois, avec de simples récépissés, ce qui accroit encore la précarité de leur situation administrative et les difficultés qui en résultent.
Depuis plusieurs années, les « Amoureux au ban public » dénoncent le durcissement continu des lois sur l’immigration qui s’est notamment traduit par la suppression de tout accès rapide et automatique à la carte de séjour de dix ans pour les étrangers conjoints de Français, parents d’enfants français ou bénéficiaires du regroupement familial notamment.
Cette politique de précarisation qui touche des dizaines de milliers de familles étrangères ou franco-étrangères doit enfin cesser !
La lutte contre les discriminations vécues par les étrangers ne saurait se limiter à quelques procès, si importants et nécessaires soient-ils. Elle exige de surcroît au minimum un retour à la délivrance de plein droit d’une carte de dix ans pour les étrangers ayant des attaches familiales, sociales ou professionnelle en France.
*Voir la dépêche AFP portant sur la condamnation de Lidl
*Les étapes de la disparition de la délivrance de plein droit de la carte de 10 ans pour les étrangers mariés à des Français :
– jusqu’en 1993, les étrangers conjoints de Français avaient automatiquement droit à la carte de dix ans. La loi « Pasqua » leur impose alors de justifier d’au moins un an de mariage pour obtenir ce titre.
– en 2003, Nicolas Sarkozy alors ministre de l’Intérieur fait voter un loi qui fait passer d’un à deux ans la durée de mariage exigée.
– en 2006, une seconde loi « Sarkozy » exige que les conjoints de Français soient mariés depuis plus de trois ans pour pouvoir déposer une demande de carte de dix ans. Mais même s’ils remplissent cette condition, les préfets ne sont plus dans l’obligation de répondre favorablement à cette demande.
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